Plein soleil sur l’emploi au port de marchandises de Marseille

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L’emploi est au beau fixe sur le port de marchandises de Marseille ! La métaphore météo est facile pour évoquer l’activité sur les terminaux maritimes de la cité phocéenne, mais on oublie vite qu’elle revient de loin et que cette croissance qui ne se dément plus depuis 5 ans n’en est que plus appréciable pour les dockers sur place. Ils ont eu aussi leur part de grain et de sale temps, quand un conflit a bloqué le port pendant près de deux ans, avec des grèves pour refuser le transfert du public vers le privé. En 2010, au point d’orgue de la période difficile, le trafic était passé de 100 à 80 millions de tonnes. Aujourd’hui, le port a retrouvé son niveau d’activité et il est même remonté d’encore deux places cette année dans le classement des 110 premiers ports mondiaux. Premier port de la Méditerranée, il emploie en 2018 plus de 40 000 personnes et continue à embaucher.

 

« Aujourd’hui on recrute des grutiers, notamment, pour les déchargements de conteneurs. Marseille a construit sa réputation sur le fait de savoir tenir les horaires. Pour garder la cadence on doit embaucher à chaque fois qu’elle augmente. Ici on cherche des dockers capables de travailler avec de très gros portiques, très hauts, à 45 mètres au-dessus du sol, pour traiter des bateaux très gros eux aussi », explique le commandant. « Nous avons un personnel fiable et c’est ce qui assure un bon rendement ». Du côté des syndicats, on estime que le transfert vers le privé s’est finalement opéré dans des conditions qui ont permis d’améliorer le quotidien des salariés : « au niveau des horaires, on a pu sauvegarder les amplitudes qu’on avait avant. On a aussi négocié une très bonne convention collective, et la reconnaissance de la pénibilité de nos métiers qui nous permet de partir trois ans avant à la retraite ».

 

Avant la réforme, il y avait 3 donneurs d’ordre différents sur le port de Fos Marseille. Aujourd’hui, l’entreprise unique a permis des gains de productivité conséquents. Dockers, grutiers, portiqueurs, agents de maintenance sont des postes toujours recherchés sur place. « Nous avons eu une convalescence difficile, avec pas mal de clients qui sont partis vers Gênes ou Barcelone en 2010, et on les comprend. Mais ils sont revenus, presque tous, certains moins vite que d’autres, mais aujourd’hui la croissance est là, la demande aussi, nos carnets de commande sont pleins. Et puis l’effondrement du pont de Gênes en Italie, paralyse l’activité portuaire là-bas. C’est dramatique pour eux évidemment, mais pour nous cela fait un surcroît d’activité intense parce que nous représentons une solution de repli pour de nombreux armateurs », explique la direction.

 

Pour gagner encore en compétitivité et améliorer davantage la fluidité du trafic, le port de marchandises de Fos-Marseille poursuit ses investissements et mise sur l’innovation : « Avec l’explosion du e-commerce, les ports doivent changer d’ère et basculer eux aussi dans le numérique. Pour continuer à réaliser de belles performances commerciales avec les conteneurs, mais aussi gérer nos deux millions de passagers chaque année, nous misons sur des outils de pointe qui permettent de gagner en efficacité pour la gestion d’entrée et de sortie des navires, et pour leur déchargement ou leur chargement. Ces logiciels portuaires de dernière génération permettent une communication constante entre les douanes, les autorités sanitaires, les cadres de direction, les manutentionnaires et les armateurs : en clair, la supply chain est totalement interconnectée, donc l’activité est à la fois hyper traçable, sécurisée, fluide et rentable, parce que l’efficacité réduit les coûts et limite la contrebande », poursuit la direction générale du Port.

 

Marseille, revenu de loin, est devenu l’exemple même de ce que les experts en compétitivité logistique nomment « smart ports », c’est-à-dire des ports « intelligents », où chaque action, chaque obligation administrative, est rigoureusement timée grâce au numérique. Cette facilité dans la transmission des flux d’information a finalement amélioré la gestion du temps pour le trafic comme pour les dockers marseillais, devenus parmi les meilleurs au monde en matière de suivi des marchandises. « L’emploi sur le port de Marseille se développe aussi à vitesse grand V dans la mission de conquête de l’arrière-pays, ce qu’on appelle Hinterland dans notre jargon : un port qui fonctionne à plein est un port qui est tourné vers la mer mais aussi vers les terres et qui sait parfaitement gérer la chaîne logistique entre les quais et le rail ou la route, pour pouvoir écouler les marchandises le plus efficacement possible vers les clients et en recevoir d’autres avec la capacité de les traiter en temps réel. Il n’y a pas d’encombrement de stocks et la disponibilité globale du port est optimisée. Cette interconnexion est primordiale et pour la garantir, il faut du personnel, il faut du monde », analyse l’Institut Supérieur d’Economie Maritime.

 

Avec la saturation des ports du Nord de l’Europe et la paralysie de l’activité à Gênes en Italie, Marseille a toutes les cartes pour devenir rapidement la plus grande porte d’entrée du sud de l’Union. Ce mois de septembre 2018, le port de Fos inaugure d’ailleurs un nouveau système de transport combiné avec la mise en place d’une convention SNCF pour le fret avec la Suisse : 3 nouvelles navettes par semaine, pour les rotations de conteneurs. Le trafic a encore augmenté de 10% en un an sur le port, pour ce volet de l’activité. Spécialisé dans les hydrocarbures, le port de Fos-Marseille veut aussi se développer dans les nouvelles énergies, éoliennes en mer et filière gaz, et espère devenir à court terme un nouveau hub de ravitaillement en GNL. Le trafic croisière évolue aussi favorablement depuis plusieurs années. Grâce à ses nouveaux logiciels et sa capacité à traiter près de 100% des marchandises en 48 heures, contre une dizaine de jours auparavant, le port phocéen vise aussi l’élargissement de sa clientèle à l’international : « nous visons aujourd’hui le monde entier », confirme la direction. Bref, l’emploi n’a pas fini de progresser, in situ.

 

 




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