Lamaneur : métier passionnant, exaltant et parfois dangereux

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Au port de Fos-sur-Mer, de Dunkerque, de Calais, de Saint-Nazaire, de Dieppe, du Havre ou d’ailleurs, il travaille au son des bateaux, parfois gigantesques, qui transitent à quelques miles de là ou viennent faire escale pour une heure ou un jour. Son environnement : le monde industriel et portuaire, devenu stratégique dans le monde commercial globalisé d’aujourd’hui. Pétroliers, porte-conteneurs, vraquiers sont les monstres qu’il côtoie chaque jour, à bord de son petit canot. Sans lui, les ports ne pourraient pas fonctionner… on parle du lamaneur, ce professionnel de la vie portuaire, chargé d’amarrer les navires.

Un métier passionnant, physique, exaltant, et parfois dangereux. « On se sent tout petit sur nos embarcations, face à certains mastodontes, c’est sûr ! », sourit l’un d’eux sur les quais du port de Marseille. « On travaille beaucoup à la voix, avec des cris spécifiques pour se faire comprendre au milieu du bruit. On a une mission toujours délicate, à chaque fois c’est particulier, c’est ce qui rend le métier attractif. Debout sur notre barge pour travailler en équilibre, il faut une attention soutenue et une coordination impeccable avec les collègues. On ressemble à des microbes face à ces navires de dizaines de mètres de hauts chargés de grands conteneurs ».


Un esprit d’équipe indispensable

Pour chaque navire, une vingtaine d’amarres sont nécessaires : ils font souvent entre 300 et 400 mètres de long« On doit travailler à l’avant, sur le côté et à l’arrière, aller vite pour que les courants n’arrachent pas les amarres déjà posées. Sur le port de Marseille, nous sommes une petite centaine de lamaneurs, regroupés en coopérative depuis la fin de la seconde guerre mondiale ! Une organisation originale que certains nous envient ! Le principe c’est un homme = une voix = une part, et chacun touche en fonction des résultats de l’année. Qu’ils aient deux ans ou 30 ans d’ancienneté, tous les lamaneurs associés encaissent la même rémunération. Personne n’y gagne plus que l’autre : tout le monde travaille pareil, et gagne pareil ! Un système égalitaire, notre président, nos chefs de service sont élus, si quelque chose ne convient pas ils redescendent sur les quais ».

Les lamaneurs sont mobilisables à toute heure du jour ou de la nuit, sur des vacations de sept jours durant lesquels ils vivent ensemble, non-stop. Dans chaque port, les lamaneurs forment une grande famille. D’ailleurs, dans la plupart des ports, il n’est pas rare que la transmission se fasse de père en fils, et que plusieurs générations d’une même famille travaillent ensemble dans le groupe. « C’est beaucoup de moments de bonne humeur, et quand on a besoin d’être seul, chacun de nous a sa propre chambre pour décompresser, couper un peu du boulot, et faire le vide : les moments de repos sont vitaux, car nous exerçons un métier à risque qui nécessite une grande vigilance. Quand l’amarre commence à chanter, qu’elle entre en tension et qu’elle rétrécit, elle va casser et les accidents arrivent à ce moment-là. Heureusement ils sont rarissimes ».


Lamaneur : un des métiers les plus prisés de l’économie portuaire

« C’est une profession peu connue du grand public », explique la direction du port du Havre, où travaillent environ 70 lamaneurs. Ils représentent des postes rares et très demandés : quelques dizaines de places pour plusieurs milliers de travailleurs sur chaque zone portuaire. Lamaneur est considéré comme un poste prestigieux. Ils sont des maillons essentiels à la vie du port, au même titre que les remorqueurs et les pilotes. Ils amarrent et désamarrent les navires, mais ils sont aussi chargés du halage et du déhalage le long des quais.

C’est un métier beaucoup plus complexe qu’il n’y paraît. La manipulation des aussières sur les quais est un travail délicat. Tout comme le contact direct avec les navires en mer, jour et nuit, 365 jours par an. Côtoyer des supertankers pétroliers peut s’avérer très risqué, il faut une vraie connaissance de la mer et des bateaux. C’est aussi un métier de polyvalence : il faut savoir conduire les camions tire-amarre, les vedettes, et les mini remorqueurs.




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